38 000 personnes expulsées de leur logement
Alors que la trêve hivernale débute ce soir à minuit, la Fondation interpelle l’Etat sur la hausse des expulsions locatives.
En 2022, 17 500 ménages, soit près de 38 000 personnes, ont été expulsées de leur logement par les forces de l’ordre. Ce chiffre record, en hausse de plus de 130 % en 20 ans, risque fort d’augmenter encore en 2023 d’après les retours de plusieurs territoires et la hausse des impayés constatée par les bailleurs1.
Dans un contexte inflationniste et de précarisation croissante, nombre de personnes sont exclues de l’hébergement et du logement, et les chiffres sont très préoccupants :
- 2,4 millions de demandeurs de logement social
- plus de 85 000 ménages en attente de relogement dans le cadre du DALO
- plus de 8 000 personnes refoulées chaque soir au 115 faute d’hébergement, dont 2 800 enfants
La Fondation Abbé Pierre, son lieu d’accès aux droits parisien, sa plateforme Allô Prévention Expulsion, ainsi que ses partenaires du réseau Accompagnement aux droits liés à l’Habitat déplorent le fait que l’État continue à bafouer quotidiennement la loi et les règles qu’il édicte lui-même. Une hausse des expulsions est constatée dans de nombreux départements, ainsi qu’un respect très faible, même pour les ménages prioritaires DALO, de l’instruction du 3 avril 2023 enjoignant aux préfets de reloger ou héberger les personnes avant l’expulsion.
« Un cap a clairement été franchi : ces derniers mois, des familles avec enfants en bas âge, des personnes en situation de handicap, des personnes âgées ont été expulsées sans même une mise à l’abri hôtelière, solution pourtant loin d’être satisfaisante », déplore Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé Pierre.
L’année à venir s’annonce bien plus sombre encore avec le vote de la loi « Protéger les logements contre l’occupation illicite »3.
Cette dernière marque un recul sans précédent et met à mal plus de 30 années de travail en faveur de la prévention des expulsions. Elle engorgera plus encore des tribunaux déjà surchargés et risque d’engendrer l’expulsion de milliers de familles supplémentaires.
De surcroît, comble de l’injustice, des personnes endettées majoritairement suite à une perte d’emploi, une maladie, une séparation ou un dysfonctionnement de l’administration, ou ayant reçu un congé de leur bailleur risquent désormais, en plus de l’expulsion, une forte amende pénale si elles se maintiennent dans les lieux en fin de procédure.
À cela s’ajoute une instruction récente du ministère de l’Intérieur4 enjoignant les bailleurs sociaux à expulser les familles de jeunes condamnés suite à des violences urbaines ou des faits de délinquance.
Dans ce contexte si préoccupant, la Fondation Abbé Pierre appelle l’État à la solidarité envers les personnes victimes d’accidents de la vie : elles ne doivent pas être stigmatisées et pénalisées, mais aidées !