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"Adieu l'Abbé" par Raymond Etienne

"Adieu l’abbé", par Raymond Etienne.

Notre fondateur nous a quittés “pour ses grandes vacances” vers d’autres rivages. Il y a eu beaucoup d’écrits, et de déclarations. Trop... parfois. La Fondation Abbé Pierre, le mouvement Emmaüs, ses proches, avaient décidé quant à eux de faire silence, par respect, par pudeur.

J’étais au côté de l’abbé Pierre depuis plus de 40 ans, pour moi et pour mes amis c’est une séparation difficile, douloureuse. Pour atténuer cette peine, ce chagrin, je me souviens de ce qu’il me confia un jour : « la mort c’est la soif de plein de soleil et d’eau claire.» «La mort est un rendez-vous longtemps retardé avec un ami, l’attente comblée.»

Belle leçon de vie et d’espoir.

Denis Lefèvre, dans le livre Les Carnets intimes de l’abbé Pierre, écrivait en introduction: «sans doute les Français se reconnaissent-ils en ce curé pas tout à fait comme les autres, en cet homme si humain avec ses contradictions et son caractère parfois difficile, ses impatiences et ses insolences, ses colères et ses entêtements, son franc parler et son indiscipline... sans oublier son humour et son humilité, bref une profonde humanité».

La Fondation Abbé Pierre se doit de continuer l’œuvre de “ce créateur boulimique”, si peu doué pour l’organisation, et faire entendre son message avec véhémence, avec indignation, pour déstabiliser les puissants et soutenir les plus vulnérables dans une société mondialisée où on cherche si peu et si mal comment tendre vers une communauté humaine, sereine et vraie. Nous avons à affronter des questions difficiles, un futur inquiétant, avec des situations de violences croissantes. Il va falloir trouver d’autres raisons d’être que produire, manger, dormir. Il va falloir, même dans le chaos, inventer une autre manière de vivre. Nous nous y engageons, pour gagner le pari de notre fondateur: «la vie, c’est apprendre à aimer.»

À bientôt l’abbé.

Raymond Etienne, janvier 2007.