« Des hommes comme l’abbé Pierre, il y en a un par siècle »
Benjamin Lavernhe est l’abbé Pierre dans le biopic « L’abbe Pierre, une vie de combats » qui sortira sur les écrans de cinéma, le 8 novembre prochain. C’est la 1ere fois que le comédien, pensionnaire à la Comédie-Française, joue dans un biopic.
C’est effectivement la 1ere fois que je joue un personnage de 25 à 94 ans ! Ce film a constitué une approche nouvelle pour moi. J’ai toujours été attiré par les biopics, c’est un genre qui m’intéresse, où il faut travailler avec l’obsession de la ressemblance physique et en même temps, essayer de s’en défaire pour ne pas être uniquement cela.
Ce film a représenté un travail assez différent de ce que j’ai pu faire jusque-là. Il y a eu une pression et un enthousiasme uniques tout au long des 12 semaines de tournage. J’ai 37 ans et je mesure 1 m 87, je me disais : « Les gens le connaissent tellement, l’abbé Pierre ! il faut que tu lui ressembles et en même temps, je savais que ce qui comptait, c’était son énergie, l’énergie qu’il dégageait et que je devais trouver et transmettre. Cette énergie, tout ce qu’il n’a pas cessé de dire, c’est ça qui était important.
Moralement, incarner l’abbé Pierre, cela m’a donné des ailes. Les valeurs qu’il porte à travers ses discours, ses histoires… on en a beaucoup parlé avec Frédéric Tellier, le réalisateur. J’ai également lu et visionné tellement d’archives ! C’est cela aussi qui a été nouveau pour moi, travailler un personnage avec autant de matière.
Le pari du biopic
J’ai eu beaucoup de plaisir à jouer l’abbé Pierre vieux, c’était éprouvant, il y avait 6 heures de maquillage pour les dernières années de sa vie ; c’était même épuisant, parfois.
J’étais très concentré et en même temps, c’était beaucoup de bonheur car j’étais ému et porté par ces mots. Il martelait ses messages ; il avait une façon extraordinaire de raconter les histoires, des histoires de vie terribles, qui le bouleversaient et bouleversaient son auditoire.
Il jubilait avec les mots, il savait les choisir, c’était un sacré orateur, avec une révolte incroyable. Ses discours m’ont beaucoup ému. J’ai beaucoup travaillé sur ses conférences pour essayer de rendre la même émotion, la même force, comme par exemple, lorsque je prends la parole dans le film, après l’hiver 54, devant 200 figurants.
Il avait le pouvoir de changer les gens : l’Appel de 54 m’a vraiment galvanisé. Je l’ai appris par cœur en 2022, je me promenais dans la rue, je le récitais et je voyais des personnes en difficulté, en errance dans la rue, et je me disais, c’est tellement d’actualité… Est-ce que ce film va faire raisonner la flamme, la ferveur de l’abbé Pierre dans ce monde où il y a tant d’injustices et de guerres ? C’est tout le pari de ce biopic.
Il y a eu « un avant et un après » pour moi, avec ce film. ll m’a obligé à me dire : Regarde, arrête-toi, ne ferme plus les yeux et les oreilles. À ma petite échelle, cela m’incite à ne plus me dire « je le ferai un jour », mais à passer à l’acte et le faire vraiment. Jouer l’abbé Pierre m’a remué dans ce sens-là. Ce biopic, c’est un voyage vers l’abbé Pierre, c’est un chemin vers lui. Des hommes comme l’abbé Pierre, il y en a un par siècle.