« Je ne m’attendais pas à tant de détresse »
Depuis 3 semaines, Brigitte est bénévole à la Boutique Solidarité de Saint-Denis, à La Réunion. Face à la crise sanitaire, elle a eu envie d’agir et de se sentir utile.
Brigitte avait pris contact avec l’agence régionale de la Fondation bien avant la pandémie du Covid-19. « Je suis en ce moment en formation pour devenir directrice d’établissement médico-social et j’avais pour projet de me rapprocher des personnes en difficulté, après une expérience auprès des personnes en situation de handicap. Mais avec le confinement, mon projet d’immersion s’est transformé en proposition de bénévolat… »
Une évolution qui est apparue comme une évidence aux yeux de Brigitte dès les premiers jours de confinement. « Je suis à l’accueil trois jours par semaine pour servir le petit-déjeuner, distribuer des tickets-service que nous avons reçus, ou encore discuter avec tous ceux qui en ont besoin. »
Depuis le début du confinement, la Boutique Solidarité est restée ouverte, du lundi au vendredi et cela, grâce à l’engagement des salariés. L’équipe bénévole, composée en grande partie par des personnes âgées de plus de 60 ans, a été réduite par mesure de sécurité et l’arrivée de nouveaux bénévoles comme Brigitte a été plus que précieuse…
Dès les premiers jours de la crise sanitaire, la Boutique a servi de tremplin pour identifier les personnes à la rue sans solution qui souhaitaient être mises à l’abri durant la période, via des places d’hébergement supplémentaires. L’agence régionale de la Fondation s’est fortement mobilisée pour rechercher des solutions évitant les remises à la rue, des financements de nuitées d’hôtels ; pour assurer la distribution de produits alimentaires, de kits d’hygiène, etc… mais aussi interpeller les pouvoirs publics locaux et coordonner l’action des différents acteurs sociaux et associatifs sur l’île.
Mardi matin, pour la première fois, Brigitte a trouvé que les personnes accueillies étaient particulièrement en souffrance. « On sent une lassitude, une inquiétude, un manque de contacts humains… le poids du confinement se fait sentir pour ces personnes qui ne peuvent plus faire la manche, qui n’ont plus aucun lien et qui ont aussi très peu d’informations. Notre rôle, c’est de reconstruire un lien de confiance, les rassurer et tenter de comprendre d’où elles viennent pour les orienter au mieux… ».
Comme avant le 17 mars, c’est une majorité d’hommes qui fréquente la Boutique Solidarité. En temps normal, la structure accueille 65 personnes en moyenne par jour, avec des pics à 80-90 personnes. Depuis la fin avril, les salariés et bénévoles ont remarqué une plus forte proportion de femmes en errance. Et alors que le nombre de passages à la Boutique s’était fortement réduit au début du confinement, le volume de personnes se présentant tous les matins est reparti à la hausse. Cette semaine, environ 40 personnes se sont présentées chaque matin, dès 06H30.
« Pour des raisons de sécurité et dans le cadre du confinement, les horaires ont été réduits et l’accueil ne se fait plus que jusqu’à 09 heures. Mais pour les démarches administratives ou les demandes particulières, il y a une certaine souplesse. L’équipe salariée est en effectif réduit, mais on arrive à servir et à soutenir tout le monde. »
Distanciation physique, gel hydro-alcoolique, gants, masques, gestes-barrières… tout est prévu pour assurer un accueil en toute sécurité.
« Je n’imaginais pas tant de situations de détresse et de tels parcours de vie. Je découvre que le basculement peut se faire à n’importe quel moment et peut toucher bien plus de personnes qu’on ne l’imagine…. Je suis à la fois étonnée et inquiète devant le fossé social qui se creuse actuellement. Clairement, je ne regrette pas du tout d’avoir proposé mes services ! Etre au cœur des besoins et se sentir utile, c’est vraiment important pour moi. Et cela dépasse largement le cadre de ma formation… »