La femme qui voua sa vie au combat de l'abbé Pierre
Lucie Coutaz (1899-1982), femme d’exception, miraculée, militante, décorée de la Croix de Guerre en 1945.
Hommage de l’abbé Pierre à Lucie Coutaz :
« Sans elle, Emmaüs n’existerait pas. C’est ce qu’affirment tous les compagnons et amis des origines. Et ils disent vrai. En toute vérité, celle qui pour tous fut toujours nommée, avec un exceptionnel respect, « Mademoiselle Coutaz », fut co-fondatrice du mouvement né en 1949.
« Ce que moi, je dois ajouter c’est que, pour quiconque a connu son tempérament, et ses dons de chef (qui lui valurent, soit dit en passant, la Croix de guerre avec citation, pour son courage dans le soutien secret à l’Armée du Vercors), il est évident qu’il lui fallut un véritable héroïsme quotidien pour, pendant 39 années, et jusqu’aux labeurs de ses dernières journées de vie, n’être toujours agissante que dans l’ombre d’un autre. »
Lorsqu’ils se rencontrent en 1943, l’abbé Pierre lui demande de faire un bulletin d’informations pour les jeunes qui avaient pris le maquis. Puis, les mois passent sans nouvelles. Elle le retrouve en 1945, à Paris, où il lui demande de la rejoindre.
L’Abbé est souvent absent, occupé à cette époque par des séries de conférences. Deux mois durant, elle n’a aucune nouvelle de lui, ce qu’elle n’apprécie guère. Quand il revient et qu’il lui annonce son projet de se faire élire député, elle lui réplique : « Je rentre chez moi ! » Finalement, elle fera avec lui sa première campagne électorale.
Lorsque les événements de février 1954 propulsent l’abbé Pierre au premier rang de l’actualité. Le mouvement Emmaüs tout juste né rencontre un immense écho. Le père multiplie conférences et voyages. Il en tombe malade. Pendant plusieurs années, c’est sur Lucie Coutaz que repose effectivement la responsabilité quotidienne, tant des communautés de compagnons que des différents centres d’hébergement que l’abbé Pierre a créés.
La tâche est écrasante. Le père absent, des conflits naissent… Lucie Coutaz, surnommée par certains compagnons « Lucie la Terreur », tient bon. Après le naufrage de l’abbé Pierre, elle contribue activement à la création d’Emmaüs International.
Lucie Coutaz est morte le 16 mai 1982, à 6 heures du matin.
« J’ai passé une partie de la nuit auprès d’elle. J’hésitais à partir, j’avais déjà mon manteau. Je n’ai versé aucune larme, comme pour mon père et pour ma mère.
Pendant sa vie, l’on a mis dans sa main, la main des pauvres… »